jeudi 15 octobre 2009



«De l'importance de la Géographie...pour la compréhension du monde contemporain.»
« Histoire et Géographie, sœurs réconciliées?»


De la Géographie? Aux rendez-vous de l'Histoire, mais pour quoi faire?! Il est vrai que parcourant la programmation de ces rendez-vous 2009, nous nous sommes (presque) tous interrogés sur la présence d'une conférence dédiée à celle à qui souvent l'Histoire fait de l'ombre, la Géographie. Et pourtant, cette présence est indispensable. La conférence s'est exprimée comme le lien entre les rendez-vous de l'Histoire de Blois, et la Géographie avec son célèbre festival de Saint-Dié-des-Vosges.

La Géographie trouve à s'exprimer à travers les voix de Sylvie Brunel, géographe spécialisée dans l'étude du développement(durable essentiellement) et de la famine (Famines et politiques,A qui profite le développement durable?),et de Jean-Robert Pitte, géographe renommé pour son appartenance à l'Académie des sciences morales et politiques et par ses études, largement diffusées, en géographie de l'alimentation(Le vin et le divin, A la table des dieux.).
Il s'agit pour eux de décrire les enjeux et missions actuels de la Géographie.

Selon S. Brunel, la Géographie s'est originellement inscrite dans le sillage de la conquête des territoires : l'homme cartographia les richesses matérielles et humaines. Pour beaucoup, la Géographie était une introduction militaire, «plantant le décor», permettant l'action des militaires. Cette vision déterministe trouve à s'exprimer dans cette citation d'Yves Lacoste : «la Géographie, ça sert d'abord à faire la guerre».
La Géographie a longtemps demeuré dans le giron de l'Histoire, et aujourd'hui encore. Ce n'est pas pour rien que l'on dit «histoire-géo».Pourtant, elle est là, connaissant une nouvelle actualité depuis les années 1990 depuis que notre vision du monde a considérablement évolué .La montée du développement durable a réintronisé la Géographie dans nos sociétés. D'ailleurs, aujourd'hui, évoquant la planète, c'est souvent la Géographie que l'on invoque.
La géographe s'est employée à démontrer que le discours actuel des médias en matière de développement et de planète (donc de géographie) pouvait être entièrement revisité. Ce discours, quotidiennement martelé, est culpabilisant et moralisateur. Il avance que la proportion hommes/ressources est devenue déséquilibrée, épuisant notre planète. Faux selon la géographe qui affirme que la capacité de charge d'un territoire dépend de multiples facteurs et qu'elle ne peut être analysée de manière absolue. Tout ne dépend pas du nombre d'individus à «utiliser» la planète mais du comment l'utiliser .
Ce discours s'offusque également devant la croissance «folle» de certains pays en voie de développement. Mais quelle légitimité avons-nous pour condamner des pays voulant atteindre le niveau de développement que nous connaissons, au prétexte que nous en connaissons les abus?
Nous ne sommes pas les seuls, pays développés, à avoir pour ambition de s'orienter vers une croissance verte.
La Géographie affirme ici sa grande utilité pour la compréhension du monde : les verdicts que l'on nous assène peuvent être déjoués. Nous avons bien su créer de la biodiversité pour répondre à nos besoins, nous possédons donc des capacités à reconstruire notre planète. Ne culpabilisons plus à outrance selon S. Brunel, "abandonnons nos conceptions idéalistes et manichéennes" du monde, et apprenons à amener à la coopération pour permettre à tous d'atteindre un certain niveau de développement par la croissance verte. «Parce que la géographie ça sert d'abord à faire la paix!»


Jean-Robert Pitte, quant à lui, fustige ce qu'il appelle «les prédicateurs catastrophiques», comprendre N. Hulot et Y-A. Bertrand. Selon lui, leurs actions contribueraient à la montée de ce qu'il qualifie de «néo-religions» dans un contexte de sacralisation de la nature et des espèces menacées. Il semble prendre grand plaisir à dire et redire, sur un ton provocateur, qu'il n'y a rien de gênant à manger de la baleine et qu'il en a d'ailleurs mangé deux fois. Mais ce n'est pas si bon...
Affirmant les mission de la géographie contemporaine, J-R. Pitte s'interroge, de façon plutôt polémique, sur la relation Histoire/Géographie aujourd'hui. Ces deux disciplines seraient «mariées pour le meilleur et pour le pire», indissociables l'une de l'autre dans l'enseignement secondaire. S'il y a plus de place à l'agrégation en histoire, c'est parce qu'il y a plus d' étudiants, mais pourquoi ces inégalités? Selon le géographe, trop peu de moyens sont accordés aux enseignants du secondaire, souvent plus historiens que géographes, pour approfondir leurs connaissances en Géographie. Le public, largement composé d'enseignants d'Histoire-Géographie, s'offusque lorsque J-R. Pitte, provoquant, avance que «la Géographie est traitée par-dessus la jambe dans le secondaire». Mais celui-ci précise, cette mise à l'écart de la géographie tient des institutions publiques et non directement des enseignants.
A cela, il réaffirme que la Géographie est fondamentalement une invitation faite à l'humanité et aux autres disciplines, à exercer leurs responsabilités sur l'orientation actuelle du monde. Pour lui, la Géographie est indispensable au monde «pour l'environnement et pour le plaisir d'étudier les inégalités terrestres, la géographie étant là pour s'émerveiller de la diversité». Les conditions humaines peuvent être étudiées de multiples façons et ces études sont permises par la Géographie.

Discours positif et dynamique de ces deux géographes favorablement accueilli par le public, malgré quelques incompréhensions... On aime ou on n' aime pas, mais il est sans conteste qu'ils expriment à eux deux une nouvelle géographie, fraîche et militante, s'affirmant comme une nécessité pour la compréhension du monde contemporain. La Géographie a fait peau neuve, nous proposant de vivre mieux, ensemble, dans un monde de diversité et de coopération. Si l'histoire nous permet de comprendre notre passé pour mieux appréhender notre présent, la Géographie nous propose un avenir différent où la coopération serait reine. Alors à quand une coopération plus approfondie entre les anciennes sœurs ennemies, Histoire et Géographie?

Lucie.Rober

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire